Une psychologue d’un PAEJ interviewée par une ado

Ci-dessus la Une du n°43 de la Gazette Saucisse et son dossier Full Santé Mentale, la revue du Lycée Jean Macé à Lanester.


Le PAEJ du pays de Lorient travaille depuis plusieurs années en partenariat avec le lycée Jean Macé de Lanester : orientations de jeunes vers le service, permanences hebdomadaires assurées par le PAEJ à la maison de quartier voisine de l’établissement scolaire, liens réguliers avec CPE et IDE, convention, etc. Cette fois, c’est avec le CDI du lycée que nous faisons du lien. Une lycéenne, Lucie Contrault, a souhaité interviewer une psychologue du PAEJ pour le n°43 de la revue du lycée «GAZETTE SAUCISSE» et son dossier “full santé mentale”. L’ensemble du travail réalisé par les lycéens est à retrouver sur twitter @GazetteSaucise  A noter que la Gazette saucisse a déjà reçu le prix national au festival confiné X-presso et le 1er prix du jury du concours régional de journaux scolaires Médiatiks 2020 et 2023.

Cette interview est réalisée par mail. Cécile Herrmann-Lehuede, psychologue au PAEJ de Lorient, répond aux questions de Lucie Contrault “sur le vif” comme lorsqu’elle travaille en face à face au PAEJ.

Quelles études avez-vous fait afin de devenir psychologue et pourquoi avoir choisi principalement d’aider les jeunes ?

Pour être psychologue, j’ai fait des études à la faculté de psychologie pendant 5 ans. Pour ma part à Nantes puis à Angers où une alternance était possible.

J’ai ensuite commencé à travailler auprès de personnes prises en charge à l’hôpital, de personnes âgées en EHPAD et en accompagnant des professionnels lors de séances d’analyse de la pratique. J’ai petit à petit choisi de me tourner vers un public de « jeunes » (et d’enfants car j’ai deux emplois) car l’adolescence est une période dynamique et percutante pour chacun(e) et je trouve très enrichissant de pouvoir accompagner de jeunes adultes vers leur autonomie, la découverte de sa propre prise en charge et donc à prendre soin de soi. C’est un moment important quand on se sépare un peu de son environnement familial et qu’on construit son propre avenir. Nous avons la chance de pouvoir proposer, au PAEJ, un lieu neutre, anonyme, confidentiel et gratuit pour que les jeunes puissent trouver un lieu d’adresse à leurs questions et être ainsi soutenus dans ce moment particulier où grandir résonne avec plein de choses. Et puis vous êtes parfois aux premières loges des évolutions sociétales et nous apprenez beaucoup !

Vous sentez vous atteinte par les différents problèmes que vos patients peuvent rencontrer ou à l’inverse vous arrivez a prendre du recul ?

En tant que psychologue, on propose un espace d’écoute et de distanciation à chaque personne qui vient nous voir. Autant prendre un peu de distance nous même du coup pour pouvoir les accompagner ! Les études puis la formation continue permettent d’apprendre à se positionner pour soutenir les personnes en restant neutre, être dans l’empathie mais pas l’affectif. Pas de jugement non plus au PAEJ !

Mais bien sûr, on est humain et donc bien sûr, la situation de chacun nous touche. On travaille aussi avec la notion de transfert et d’ailleurs ça marche dans les deux sens : il faut aussi que ça passe entre soi et son psy. Pour cela, nous sommes deux psychologues et une éducatrice spécialisée au PAEJ : cela laisse donc plusieurs possibilités pour trouver à être à l’aise.

Avez-vous reçu plus de jeunes depuis la vague du Covid-19 ? (de quel type? jeunes? personnes plus âgées?) Quelles en sont les raisons selon vous ?

Depuis la crise sanitaire, nous avons plus de demandes mais surtout des demandes qui reflètent un plus grand isolement de jeunes et leur difficulté à se tourner vers certaines institutions. On accompagne pas mal de jeunes pour qu’ils reprennent confiance en eux et en leur avenir. Rebondir et réinvestir les établissements scolaires par exemple n’a pas toujours été facile… Il a fallu retrouver envie, désir et projet !

Quelle est la principale cause, selon vous, pourquoi les adolescents sont plus anxieux et angoissés qu’avant ?

Je fais l’hypothèse que des jeunes ont été confrontés à l’angoisse des adultes. Les repères ont été bousculés et il faut encore trouver de nouveaux appuis parfois entre pairs. Les coupures vécues et rythmes irréguliers ont créé des espaces voire des temps morts pas toujours simples à aménager. Ce sont des hypothèses car chaque vécu reste propre à chacun et les généralités à limiter.

Vous, comment vivez-vous le fait d’être psychologue et d’aider quotidiennement les jeunes?

Le métier de psychologue est passionnant et fait de rencontres en permanence : avec les jeunes, avec d’autres professionnels, etc. Chaque situation est singulière et il faut inventer avec la personne des solutions pour l’aider en s’appuyant sur ses ressources. On ne prodigue pas de conseil ou de mode d’emploi tout fait (pas de savoir préconçu) mais on accompagne chacun à en savoir un peu plus sur son fonctionnement et donc ses solutions. Quand on est psychologue, on peut aussi travailler à temps partiel sur plusieurs institutions et ça c’est une autre richesse du métier. Donc ça bouge tout le temps et le quotidien est bien varié !

Existe-il différents types de psychologues ?

Il y a autant de psychologues que de professionnels ayant fait ces études ! Chacun a son style.

Mais au-delà de ça, une différence peut se faire dès les études et les centres d’intérêt qu’on a : plutôt psychologie sociale et du travail, psychologie clinique et psychopathologie, neuropsychologie etc. Cela dépend aussi des institutions, structures et établissements dans lesquels on travaille (hôpital, associations, protection de l’enfance, etc) et du public auprès duquel on intervient.

Et enfin, ça dépend de nos outils de travail et de notre orientation :  par exemple si on considère que l’inconscient, ça existe comme dans la psychanalyse (qui n’est pas que Freud avec son divan !) ou pas.

Que penseriez-vous de mettre des psychologues dans les écoles sachant que les infirmières ne sont pas formées pour et que certaines personnes n’ont justement pas les moyens d’en consulter ?

Le PAEJ est un service qui n’est jamais loin des établissements scolaires. Le but est d’aller vers les jeunes qui souhaiteraient un rdv mais aussi de favoriser la démarche de venir à ces rencontres. C’est pour cela qu’il me semble intéressant d’être un relais pour les écoles mais de garder un petit espace autre pour qu’une demande soit formulée par le jeune qui vient. Les infirmières sont à l’écoute et peuvent orienter vers le PAEJ. On est complémentaire et quand c’est possible, il peut être intéressant de sortir de l’établissement scolaire pour qu’un accompagnement puisse se poursuivre en toute neutralité.

Et enfin pour terminer, vous qui êtes professionnalisée pour, auriez-vous un conseil général / un message à faire passer aux jeunes aujourd’hui ? (si non, pas de soucis!)

Ne restez pas seul avec votre question ou votre problème !

Cécile LEHUEDE

psychologue clinicienne, PAEJ du Pays de Lorient