Au cœur des séances d’immersions sensorielles

D'un monde à l'autre, un projet porté par le PAEJ de Morlaix et l'association Sentier vous bien.

« Nous ne sommes pas seulement corps, ou seulement esprit ; nous sommes corps et esprit tout ensemble. » Georges Sand


À l’occasion de mon stage au PAEJ de Morlaix dans le cadre d’une licence professionnelle en intervention sociale auprès des publics vulnérables, j’ai pu participer à 5 séances d’immersions sensorielles avec l’association « Sentier Vous Bien ». Ce projet est en partenariat avec le PAEJ et se nomme « D’un Monde à l’Autre ».

Ce projet m’a particulièrement intéressé pour différentes raisons. En effet, je réalise mon mémoire sur les pratiques psycho-corporelles, la problématique étant : « Quels impacts positifs ont les pratiques psycho-corporelles auprès des personnes accompagnées ? »

Un premier stage à la maison d’Ella

J’ai choisi cette thématique qui est aussi en lien avec mon premier lieu de stage à La Maison d’Ella à Bordeaux qui accompagne les femmes victimes de violences en post-traumatisme avec une prise en charge psycho-corporelle d’ une équipe pluridisciplinaire telle que psychologues formés à l’ICV (Intégration des Cycles de Vie), EMDR (Eyes Movement  Desensitization and Reprocessing), une psychologue danseuse formée à la lecture du mouvement, une socio-esthéticienne, une art-thérapeute, une éducatrice spécialisée sensibilisée et formée à l’accueil, une éducatrice spécialisée formée à l’ICV, thérapeute familial et conseillère conjugale et familiale, une ostéopathe, une médecin gynécologue acupunctrice formée aussi à l’auriculothérapie, une sophrologue, une coordinatrice et 2 médecins psychiatres, assistante sociale, une coordinatrice  formée comme conseillère conjugale et familiale  et une équipe de direction. J’ai en plus eu la chance d’assister à leur premier colloque en novembre 2022 intitulé « L’approche psycho-corporelle dans la prise en charge des femmes victimes de violences » marainnée par Gahda Hatem.

Un parcours professionnel antérieur

À cela s’ajoute mon parcours professionnel et personnel qui m’ont mené à ce choix. J’ai été infirmière pendant 12 ans, j’ai pu exercer dans différentes structures de soins et me former à différentes approches du soin. À travers des voyages, j’ai pu apprendre et découvrir des techniques de massage, de relaxation profonde dans l’eau, de comment prendre soin autrement. J’ai également réalisé une formation de Shiatsu entre 2018 et 2020 (« terme japonais signifiant pression des doigts, c’est une discipline manuelle de régulation des énergies et de détente, pratiquée depuis des millénaires en Extrême Orient, qui consiste en des étirements et des pressions sur l’ensemble du corps qui est habillé, le plus souvent avec les doigts, plus particulièrement les pouces et les paumes selon la définition de la FFST (Fédération Française de Shiatsu Thérapeutique). »)

Dans une de mes expériences professionnelles infirmière, j’ai aussi pu co-construire des ateliers avec des éducateurs et moniteurs-éducateurs lorsque je travaillais dans une association avec des enfants et adolescents malentendants avec handicaps et troubles associés, l’IRSA (Institut Régional des Sourds et des Aveugles) à Bordeaux. Lors de ces rencontres organisées et accompagnées avec leurs encadrants, nous avons pu remarquer que ces séances leur procuraient un bien-être, qu’ils étaient en demande au fur et à mesure que ces séances durent plus longtemps, qu’ils appréciaient ce contact et ce toucher. Nous pouvons supposer que pour certains enfants, cela leur permettait de définir leur schéma corporel, mettre des limites à leurs corps, les rassembler.

Il me semble important de rappeler la définition de la santé de l’OMS selon laquelle « La santé est un état de complet bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité » conduit à penser autrement les parcours de soins en termes de parcours de santé et plus largement à se poser la question de la qualité de vie, à tous les âges de la vie.

L’expérience des sorties en immersions sensorielles

J’ai pu retrouver à travers ces sorties en immersions sensorielles cette recherche de bien-être physique, psychique et social qui permettent de se connaître, de se rencontrer soi et d’autres, d’appréhender son corps. Un accompagnement des jeunes ayant des difficultés à un moment donné autour d’un projet innovant de réappropriation de son corps, une (re)connexion à soi, de (re)découvrir ces sens dans un environnement naturel où l’encadrant offre une palette d’outils dans le but que le jeune s’en saisisse et intègre au fur et à mesure des séances. Le but étant que le jeune devienne autonome grâce à ces techniques proposées. Ces exercices sont à but préventif d’un mieux-être, d’un apaisement, d’un lâcher prise, de s’écouter soi et de prendre un moment pour soi. C’est aussi un temps pour prendre conscience de son corps et de faire un pas de côté, de se décaler de ses problématiques pour prendre du recul et les aborder autrement. Certains jeunes ont d’ailleurs pu exprimer que depuis leurs premières séances ils se sentaient moins angoissés, dormaient mieux. D’autres ont pu exprimer leurs interrogations sur leurs inquiétudes, leur tristesse par des pleurs pendant les séances. Les jeunes sont plutôt favorables à l’idée de revenir à ces immersions sensorielles.

D’ailleurs, depuis quelques années se développent ces approches psycho-corporelles. « Selon les chiffres de l’OMS de 2003, en France, 49% de la population a eu recours au moins une fois à la médecine complémentaire. Les méthodes psycho-corporelles, segment de ces médecines non conventionnelles, comprennent l’ensemble des approches prenant le corps comme médiation. Elles envisagent le corps comme moyen d’expression du bien-être, de la douleur et aussi de la relation. Par le toucher, ces approches agissent sur la personne dans sa globalité, corps et esprit, un toucher qui prend soin d’un corps souffrant tellement altéré par la maladie grave. Le patient peut ainsi percevoir son corps autrement que comme un corps uniquement objet de soins grâce à un contact doux procurant de réelles sensations de détente ».

Une Stratégie nationale de santé 2018 – 2022 a été élaborée avec un premier axe mettant en avant le besoin de développer prioritairement la promotion de la santé et la prévention. En 2012, l’APHP sort son premier rapport sur les médecines complémentaires avec un comité d’organisation des médecines complémentaires. En 2022, le CHU de Bordeaux a inauguré un service nommé UMIC Unité de service de médecine intégrative et complémentaire. Des instituts comme l’A-MCA Agence des médecines complémentaires adaptées, fondée par Véronique Suissa Docteure en psychologie, Serge Guérin sociologue et le Dr Philippe Denormandie ou comme l’IFPPC (Institut Français des Pratiques Psychocorporelles) fondée par Isabelle Célestin-Lhopiteau psychologue apparaissent de plus en plus dans le paysage médical, du soin, de la prévention et de la promotion de la santé. Il se propose aussi actuellement des DU (Diplôme universitaire) de thérapie complémentaire comme à Grenoble ou le DIU (Diplôme inter-universitaire) comme à Paris-Saclay ou un DESU (Diplôme d’études supérieures universitaires) à Paris 8.

On peut en déduire qu’à travers ces différents exemples et la valorisation de ces pratiques, que l’approche psycho-corporelle semble indispensable au bien-être et au mieux-être de chacun, que renouer des liens entre corps, cerveau et esprit profitent à chaque personne. Certains disent même que « Le corps n’oublie rien ».

Fanny LE BORGNE

stagiaire, PAEJ Pays de Morlaix